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Finissons cette série qui j’espère vous aura aidé au mieux à comprendre les principaux points débattus dans la littérature concernant l’IE. Cet article sera principalement un résumé des 3 premiers en y ajoutant une perspective et de l’espoir pour l’IE ainsi qu’une conclusion qui propose au final quoi retenir et quoi dire de cette IE.

Tout d’abord donc un bref résumé pour retenir 3 points importants de toutes les informations qui ont été données :

  • 1) L’IE que ce soit sous forme trait, sous forme mixte ou sous forme capacité, n’a visiblement absolument pas le pouvoir prédictif du QI concernant la réussite professionnelle, scolaire, ou la performance. Les allégations assez présomptueuses de Goleman dans les années 90 sont plus qu’invalidées par 30 ans de recherche sur le sujet. Au mieux, l’IE sous forme capacité peut avoir un léger intérêt significatif dans les questions de performances scolaires et professionnelles. Ça ne vaut pas une mesure d’intelligence cognitive mais c’est toujours bien à prendre.
  • 2) Les versions Traits et mixtes de l’IE n’ont à mon sens pratiquement aucun intérêt de par leur superpositions très fortes avec des construits existants en psycho. Il n’est certainement pas question d’intelligence émotionnelle dans ces versions là. Il est question de traits de personnalités sous jacents aux BIG FIVE.
  • 3) Les tests de performance sont prometteurs et semblent les plus appropriés mais ils sont entachés de plusieurs problèmes importants dans leur façon de mesurer l’IE. De même le modèle sous jacent qui est le modèle à 4 branches de Mayer & Salovey, doit définitivement être revu, amélioré et rendu plus robuste pour être une base solide sur laquelle les tests pourront s’appuyer pour mesurer des capacités émotionnelles.

L’intelligence émotionnelle a été mal pensée.

Je pense que le problème dès le départ a été de penser qu’il est possible d’imaginer un modèle pour l’IE distinct du QI, des capacités cognitives et donc du facteur g. Bien que des auteurs comme Salovey & Mayer parlaient bien d’une intelligence ‘ parallèle et liée mais distincte ‘ de l’intelligence cognitive, je ne vois pas comment il est possible de conceptualiser une intelligence ‘ parallèle ‘ à l’intelligence cognitive. L’intelligence cognitive est l’intelligence tout court conceptuellement parlant en psycho. Ce qui a attrait aux émotions n’est certainement pas délié du cognitif, ne revenons pas à notre fameux ‘ émotions vs raison ‘ qui n’a aucun sens. Les capacités émotionnelles sont par définitions liées au cognitif et ne sont probablement même pas ‘parallèles‘. Comme le montrent plusieurs études, le facteur g est présent dans les mesures d’IE-Capacité, parce que de fait, percevoir des émotions ou comprendre des émotions n’est certainement pas délié des processus cognitifs en lien avec l’intelligence. Je pense qu’il faut retenir une chose essentielle, et c’est ce que ce sont tués à essayer de montrer des psychologues comme Carroll; l’intelligence humaine est un phénomène extrêmement vaste et transversal. L’intelligence est un truc qui est présent de manière quasi permanente dans tout ce qui va requérir une forme d’analyse et d’appel à l’abstraction. Dés qu’on résout un problème, c’est l’intelligence g qui entre en ligne de compte. ll n’existe pas plusieurs ‘ formes d’intelligences ‘ , pour peu qu’on saurait définir ce que ça voudrait dire concrètement. Actuellement, en psycho, il est établi qu’il existe une seule intelligence, un truc hyper vaste et complexe qui se répercute dans plein de domaines différents. Allant de la cuisine à la maçonnerie en passant par le calcul algébrique et sans oublier la capitale du Vénézuela. C’est un logiciel général de résolution de problèmes.

Quel avenir pour l’IE ?

Sur instagram, ma série de post en accord avec cette série d’article a en page de garde ce joli design :

La raison à ça est qu’il me semble aujourd’hui plus justifié d’employer le terme compétences émotionnelles et non pas Intelligence émotionnelle pour plusieurs raisons que vous aurez peut-être déjà comprises arrivé à ce stade de lecture après les 3 premiers articles.

L’intelligence émotionnelle a probablement un avenir en psycho, il existe sans doute un regroupement de capacités émotionnelles qui peuvent s’établir comme l’IE. Des données tentent de plus en plus d’intégrer l’IE comme un sous composant du modèle CHC de l’intelligence dont je vous ai parlé dans l’article 2. On tente de faire rentrer l’IE comme un vrai ensemble de capacités intellectuelles voisine de l’intelligence cristallisée ou fluide. Et les résultats sont plutôt encourageants à vrai dire. Voyez plutôt ce schéma récapitulatif:

Figure 2. Cattell–Horn–Carroll (CHC) theory of cognitive abilities versus hierarchical model of EI as Stratum II ability.  

Il faut cependant garder en tête que si conceptuellement parlant ça a du sens, il reste évidemment ensuite à déterminer EXACTEMENT qu’est ce qui est compris dans cette IE. Qu’est ce que c’est exactement. SI c’est la capacité à gérer ses émotions, ou à comprendre celles des autres et les siennes, ou à percevoir les émotions, ou si c’est tout ça en même temps. Enfin bref, il reste à établir avec plus de fermeté ce que l’IE est réellement. Il faut également mettre au clair à quel point l’intelligence cristallisée joue dans tout ça et si l’IE est mieux pensée comme une intelligence de ‘ connaissances ‘ ou de ‘ raisonnement ‘ qui serait donc plus proche de l’intelligence fluide dans ce cas. Et ensuite, évidemment pour finir, il reste à mettre au point des tests qui mesurent ces capacités là exactement aussi. Il reste donc beaucoup de choses à faire, en tout cas de mon point de vue, pour que l’IE soit établie comme réelle intelligence. C’est pourquoi aujourd’hui, avec prudence, je préfère parler de compétences émotionnelles pour d’une part, me séparer de tout ces débats et toutes ces problématiques autour de l’IE. Et d’autre part, parce que je juge qu’il n’y a pas suffisamment de robustesse et de consistance dans les données pour affirmer qu’il existe quelque chose aujourd’hui comme l’INTELLIGENCE émotionnelle. On ne sait pas dans quel sens vont aller les données dans les 30 prochaines années, et il est possible qu’on finisse par abandonner totalement le concept même pour le reléguer à une place de ‘ skills ‘ , de compétences.

Peut-on dire que l’intelligence émotionnelle existe ?

Terminons avec une vraie réponse à cette question. Après tout, c’est le titre de cette série. La réponse peut être oui et non selon l’angle et le niveau auquel vous voulez parler de l’IE. Mais je vais tenter d’argumenter en faveur d’un non plutôt qu’une réponse positive.

D’un point de vue scientifique et rigoureux, il est tout à fait soutenable et défendable de dire que l’IE n’existe pas. Comme nous l’avons vu sous différents points, l’IE est loin d’avoir coché les cases nécessaires à ce que elle puisse être considérée comme un construit valide et robuste en psycho conceptuellement parlant. Une façon de défendre malgré tout l’utilisation d’intelligence émotionnelle comme terme approprié, serait de dire qu’au final on sait un peu tous de quoi on parle quand on l’utilise et que ça s’est imposé au fur et à mesure dans le langage courant. D’un coté, c’est vrai, ça c’est clairement imposé et on a tous relativement une vague idée de quoi il s’agit. Mais, et je pense que c’est là où le bat blesse, on ne sait pas REELLEMENT de quoi il s’agit en fait. Comme vous l’avez lu à travers ces 3 articles, l’IE ça peut être tout et n’importe quoi. Il faudrait donc bien se mettre d’accord sur qu’est ce qu’on entend par ‘IE ‘ dans un discours quand on l’emploie. Egalement, pour moi, continuer à parler d’INTELLIGENCE émotionnelle entretient la confusion d’une différence fondamentale avec le cognitif, avec l’intelligence scolaire ou je ne sais quel autre bêtise. L’intelligence est un des concepts les moins bien compris par le grand public en psycho pour sûr, et le rajout de cette terminologie d’intelligence émotionnel n’aide certainement pas à éclaircir le terrain. Pour ces raisons, et même si je ne vous lancerai pas la première pierre si vous veniez à utiliser le terme d’IE, je choisis et j’encourage ceux soucieux de faire passer de meilleures idées, d’utiliser le terme de compétences émotionnelles. L’avenir nous dira si il pourra à un moment être substitué pour laisser place à l’intelligence émotionnelle.

Bibliographie :

  • Evans, T. R., Hughes, D. J., & Steptoe-Warren, G. (2020). A conceptual replication of emotional intelligence as a second-stratum factor of intelligence. Emotion (Washington, D.C.)20(3), 507–512. https://doi.org/10.1037/emo0000569
  • MacCann, C., Joseph, D. L., Newman, D. A., & Roberts, R. D. (2014). Emotional intelligence is a second-stratum factor of intelligence: evidence from hierarchical and bifactor models. Emotion (Washington, D.C.)14(2), 358–374. https://doi.org/10.1037/a003475
  • Völker J. (2020). An Examination of Ability Emotional Intelligence and Its Relationships with Fluid and Crystallized Abilities in a Student Sample. Journal of Intelligence8(2), 18. https://doi.org/10.3390/jintelligence8020018

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